Après que Valérie Plante a annoncé qu’elle ne se représenterait pas, Luc Rabouin a été élu par les membres de Projet Montréal pour représenter le parti de la majorité aux élections municipales de novembre prochain. L’actuel maire du PlateauMont-Royal affrontera notamment Soraya Martinez Ferrada, candidate d’Ensemble Montréal. Dans une entrevue avec Échos Montréal, il revient sur son parcours et présente son projet pour la ville.

© Luc Rabouin Facebook

Pourriez-vous nous présenter votre parcours?

Je suis le papa de deux grands enfants de 17 et 19 ans. J’ai grandi en banlieue de Montréal, et comme beaucoup de Montréalais, je suis arrivé ici pour mes études universitaires à 18 ans. Je suis depuis resté sur l’Île de Montréal, mais j’ai aussi eu l’occasion d’habiter à Paris pendant deux ans, ainsi qu’au Brésil et au Mali pendant quelques mois […]. À chaque fois que je rentre à Montréal, je me sens chanceux de pouvoir habiter ici. On a une ville magnifique, une qualité de vie qui est exceptionnelle. Sinon, je suis quelqu’un qui a toujours été engagé socialement. J’ai travaillé dans des organisations du milieu associatif, j’ai dirigé le Centre d’écologie urbaine de Montréal pendant six ans, j’ai été organisateur communautaire dans un CLSC à Lachine […] J’ai également dirigé la filiale de Communauto en France, à Paris. Et j’ai travaillé ensuite en développement économique local, à PME Montréal et à la Caisse Desjardins en financement d’entreprises. Et puis je me suis lancé en politique en 2019. Ça ne fait pas longtemps, je ne suis pas un politicien de carrière. Ce qui m’animait le plus à ce moment-là, c’était vraiment de m’assurer qu’on garde le cap sur la transition écologique. Pour moi, c’était l’enjeu le plus important. Je pensais beaucoup à mes enfants […].

Vous avez dernièrement été élu chef de Projet Montréal, pour être le candidat du parti aux prochaines élections municipales de novembre. Qu’est-ce qui motive cette candidature à la mairie?

Aujourd’hui, la transition écologique reste quelque chose d’important pour moi. Ce n’est pas un sujet qu’on peut évacuer, même s’il y a des gens au sud de notre frontière, ou même ici, qui voudraient bien qu’on mette la question environnementale de côté. Pour moi, il n’en n’est pas question. Donc je veux vraiment qu’on garde le cap là-dessus. Mais aujourd’hui, la question qui me touche le plus et sur laquelle je veux consacrer le plus de mon énergie, c’est vraiment la crise du logement. Je pense que c’est la priorité numéro un des Montréalais et des Montréalaises, car la crise du logement ne touche pas seulement les personnes à plus faible revenu, mais toutes les personnes qui doivent se chercher un logement. Quand j’ai été élu [maire du Plateau-Mont-Royal en 2019], j’ai été vraiment impressionné du nombre de personnes qui me témoignaient qu’elles avaient été victimes d’une éviction ou qu’elles avaient des difficultés à se trouver un logement. Ça m’a fait prendre conscience que cette crise-là est vraiment importante. C’est pour cette raison que je veux y consacrer encore plus d’énergie. On a déjà fait beaucoup de choses, à la mairie du Plateau et à la Ville, mais je pense qu’on peut aller encore plus loin.

À ce propos, sur quoi voulez-vous miser pour lutter contre la crise du logement?

Évidemment, la question du logement est une responsabilité partagée entre les trois paliers de gouvernement, et la Ville a un certain rôle à jouer […]. Selon moi, il y a essentiellement deux choses qu’on peut faire. La première est de protéger les locataires, et de s’assurer qu’il reste des logements abordables existants. Et ça, on peut le faire en informant davantage les locataires de leurs droits. Quand j’étais responsable du budget, on a ajouté 1,5 million $ pour aider les comités de logement qui font de l’information auprès des locataires. Le deuxième élément, c’est de sortir des immeubles du marché […]. Lorsque j’étais président [du comité exécutif], on a acquis 700 logements dans Côte-des-Neiges, pour un coût de 103 millions $, afin de protéger les familles immigrantes à faibles revenus d’une probable éviction. Et ça, j’en suis très fier. 

Vous dites vouloir associer la lutte contre la crise du logement à celle contre l’itinérance…

Oui, ces deux crises-là sont liées […], parce qu’un des principaux problèmes des personnes qui sont dans la rue, c’est qu’elles n’ont pas de logement. Donc si on était capable d’héberger les personnes en situation d’itinérance, on réglerait une partie du problème. Mais pour les personnes qui ont des troubles sévères de santé mentale ou des problèmes de toxicomanie, ça prend également des services spécialisés. Et ça, pour moi, c’est la responsabilité du gouvernement du Québec, car la santé et les services sociaux sont une compétence exclusive provinciale. Nous, on est prêts à aider, mais on ne peut pas prendre toutes les responsabilités sur nos épaules.

© Luc Rabouin Facebook

Concernant la mobilité, quels types de transports voulez-vous continuer à développer à Montréal?

Durant les huit premières années de Projet Montréal, on a mis beaucoup d’emphase sur le réseau cyclable. C’est normal parce que c’est la ville qui en a le contrôle, on ne dépend pas des autres paliers de gouvernement. Moi, je suis extrêmement fier du Réseau express vélo, notamment comme maire du Plateau, parce que je vois bien qu’il y a des gens qui l’utilisent. On voit des enfants, des familles, des personnes plus âgées. On ne voyait jamais ça avant sur la rue Saint-Denis. Puis, ça a été bon pour le commerce […]. Pour le prochain mandat, je veux qu’on mette autant d’énergie sur le réseau de bus. On touche ici d’autres personnes, qui se déplacent en bus et qui sont souvent pris dans le trafic. Donc, je veux vraiment travailler sur l’efficacité et la performance du réseau de bus, en mettant notamment en place des voies réservées.

Les enjeux environnementaux sont parmi ceux que vous jugez prioritaires. Quel rôle voulez-vous faire jouer à Montréal dans la transition écologique?

Je pense que ça, c’est vraiment un legs de Valérie Plante. Montréal est maintenant reconnue comme un leader mondial en transition écologique, ce n’était pas le cas avant […]. Moi, je veux qu’on continue dans cette lancée. Ça veut dire, bien sûr, qu’il faut qu’on adapte le territoire aux changements climatiques, qui causent des périodes de grandes chaleurs et des inondations. On a commencé et on va continuer à faire des parcs et des rues éponges, qui absorbent l’eau. Dans le même temps, on crée de la végétation, qui nous permet de de lutter contre les îlots de chaleur et de protéger la biodiversité. Maintenant, on sait qu’il faut multiplier ce type de projet-là. Montréal a pris des engagements importants, et c’est l’une de mes priorités de continuer à les tenir […].

En quoi votre vision et votre programme se distinguent de ceux d’Ensemble Montréal et de Soraya Martinez Ferrada, votre adversaire dans cette élection?

À Projet Montréal, on veut une ville avec des quartiers habités, complets, verts et dynamiques, pour tout le monde et pas juste pour les gens les plus riches […]. Ça fait 8 ans que Projet Montréal est au pouvoir, mais le parti a 20 ans. Je pense que les gens savent à quoi s’attendre. La seule chose que je sais d’Ensemble Montréal, c’est qu’ils sont contre nous. Mais c’est difficile de saisir leur vision et leur projet pour Montréal […]. On a la chance d’habiter dans une ville extraordinaire […]. Montréal est reconnue pour sa culture, sa créativité… On veut continuer à valoriser ça, et on a plusieurs atouts pour le faire. Il y a encore beaucoup de défis, mais on va y travailler, on va faire des propositions. Et on a bien hâte d’entendre Ensemble Montréal faire des propositions aussi.

Vous semblez vous inscrire dans la continuité des mandats de Valérie Plante. Mais y’a t-il des choses que vous allez faire différemment?

On est dans le même cadre de valeurs de Projet Montréal. Après, on a une personnalité, des expériences, et une approche différentes, bien sûr. Durant ma carrière, j’ai toujours collaboré étroitement avec différents acteurs. C’est une grande force que j’ai d’être capable de travailler avec tout le monde. Je le fais aussi depuis que je suis élu. Je peux donc autant travailler avec des comités logements qu’avec des développeurs immobiliers, avec des commerçants, avec des citoyens. On nous reproche parfois [à Projet Montréal] de ne pas être assez à l’écoute. J’entends parfois Mme Martinez Ferrada ou Ensemble Montréal dire «nous, on va rallier tout le monde, on va être à l’écoute». Mais c’est très rare qu’on ait l’unanimité. Moi, je pense que je suis quelqu’un qui est à l’écoute, qui prend en compte tous les points de vue, mais qui est aussi capable de prendre des décisions […].

Vous dites vouloir «faire face au vent de la droite radicale qui souffle en ce moment». Est-ce que le progressisme a encore ses chances au municipal, alors qu’il recule à tous les autres paliers et dans de nombreux pays?

C’est un peu effrayant ce qui se passe aux États-Unis. Puis on le voit aussi au Canada et au Québec, il y a un discours de droite qui est beaucoup plus présent et décomplexé. Il faut qu’on se batte contre ça. Il faut qu’on reste une voix forte pour les droits sociaux, pour l’égalité, contre le racisme et les différentes discriminations. Et moi, ce qui me donne notamment confiance, c’est qu’il y a des élus progressistes. À la dernière élection municipale [en 2021], il y a eu une vague d’élus progressistes dans différentes villes au Québec […]. Je veux évidemment faire tout mon possible pour qu’on résiste ici à Montréal, pour qu’on continue à protéger les droits sociaux, la démocratie, puis qu’on garde le cap sur la transition écologique.

Bannière principale: © Luc Rabouin Facebook

À propos de l'auteur

Charline Caro

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