La Mairesse de Montréal, Valérie Plante, souhaite instaurer le plus grand nombre de rues piétonnes de l’histoire de la ville. Si cette initiative a des bases nobles – et peut même s’avérer intéressante pour certains secteurs très spécifiques, à condition d’être bien implantée – les nombreux détours de la mairesse pour y arriver le sont beaucoup moins.

En l’occurrence, on parle ici de la St-Hubert. La mairesse indique avec satisfaction que lors de la consultation avec quelques 400 commerçants ayant directement pignon sur la rue St-Hubert (ni les résidents, ni les commerçants des rues avoisinantes n’ont été consultés), 55% ont voté en faveur versus 24% qui sont contre. Sauf que cet échantillon n’est basé que sur la seule soixantaine de commerçants qui ont répondu, soit un famélique 15% des marchands sondés.

Au final, les 33 personnes qui se sont dites en faveur de piétonniser cette artère commerciale iconique de Montréal, ne représente donc que 8% du nombre total de commerces que cela engloberait, un pourcentage insignifiant et ultimement trop embryonnaire pour afficher une si grande confiance d’aller de l’avant avec une telle mesure et dont les coûts estimés se chiffrerait à 12 millions $. Sans compter que l’on n’a même pas daigné consulter les résidents du secteur qui seront indirectement touchés par le projet, alors la Ville parle sans cesse de sa volonté de promouvoir une agréable « vie de quartier ».

Dans le même élan, on pourrait prendre l’exemple du Vieux-Montréal, alors que justement on sonde présentement les commerçants et les Gens d’affaires du Quartier historique, dans le cadre d’un projet-pilote qui établirait des zones à priorité piétonne dans certains secteurs. Sauf qu’on le fait de la bonne façon, en s’affairant aussi à consulter les quelque 6000 résidents et ceux qui les représentent. On sait aussi fort bien que la consultation par voie électronique n’est qu’une des premières étapes d’un processus qui doit être planifié avec soin afin de définir les besoins de chacun.

C’est une démarche dont nous avons l’expérience au Vieux-Montréal, comme cela avait été mon cas lorsque j’étais Président de l’ancienne Association des Commerçants du Vieux-Montréal et avant mon implication pour la fondation de l’actuelle SDC du Quartier historique. La mise en place d’une rue St-Paul piétonne à l’époque avait exigé la rencontre directe de tous les propriétaires de commerces, en plus d’une Assemblée Générale spéciale des Commerçants au Marché Bonsecours pour débattre du projet et où j’avais donc dû défendre cette initiative.

Que la Ville de Montréal ait des idéologies socioéconomiques, c’est tout à fait légitime. Mais sur le terrain, elle doit laisser la prérogative de consultation – et offrir un financement logistique supplémentaire – à la SDC concernée. Celle-ci pourra mettre un comité chargé de faire une vraie consultation, qui inclura non seulement les commerçants, mais aussi les gens d’affaires et les résidents, et un/des représentant(s) de la ville, de même que le voisinage directement impacté par le projet.

Dans chaque pays du monde, toutes les grandes villes veulent créer un dynamisme à leur image et c’est normal. Dans beaucoup de villes scandinaves par exemple, de même qu’en Australie, la piétonnisation c’est la norme. On peut également penser aux prestigieux Champs-Élysées à Paris, ou encore à la Rambla, à Barcelone, où la rue est partagée entre les voitures et les larges trottoirs de passants, bien que dans ce dernier cas de figure, la cohabitation avec les résidents barcelonais ne soit pas des plus harmonieuses, ceux-ci ayant ras-le-bol de l’afflux de tapage nocturne, et de la prolifération des déchets sur la voie publique.

Pour ce qui concerne la métropole montréalaise, l’implication de la mairesse se doit d’être d’indirecte, elle ne doit pas être la « programmeuse » du projet, mais plutôt soutenir les porteurs de la démarche, de tenir compte des recommandations faites par le Comité de consultation, comme par exemple celui mis en place pour le Vieux-Montréal, et de collaborer en conformité avec les propositions et le leadership dudit comité.

Le Quartier historique est un pôle d’attraction majeur de la ville, avec des millions de touristes qui investissement ses rues chaque année, et quelque 40 000 travailleurs qui le fréquentent chaque jour. C’est une démarche qui doit être faite de manière démocratique, puis acceptée et entérinée de façon majoritaire par ceux qui sont directement ou indirectement concernés par ce grand changement urbain.

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Vincent Di Candido

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