– Collaboration spéciale, Francine Faucher –

 

La saison dernière, quatre pièces fort différentes ont retenu mon attention.
En résumé, les voici:

© agentsdoubles.ca

VERDICT

Les sœurs Rozon des Productions Agents doubles ont eu l’excellente idée de présenter 4 causes qui ont alimenté les amateurs de chroniques judiciaires de par des procès très médiatisés dont le mariage de conjoints de même sexe et la retentissante «Affaire Morgentaler» sur le droit à l’avortement au Canada.

Les extraits des plaidoiries, basés sur les textes originaux, ont été défendus avec brio par deux acteurs chevronnés soit Marie-Thérèse Fortin et Paul Doucet.

Une projection d’images de documentaires d’époque ajoutaient un complément d’information intéressant.

Le clou de la pièce fut de faire deviner par l’assistance si un accusé avait été finalement condamné, 15 ans auparavant.  Les spectateurs.trices pouvaient voter à main levée. Le résultat de ce procès fut révélé avant de clore ce spectacle intelligent. À voir et à entendre les applaudissements nourris dans la salle Pierre-Mercure, assurément, ce concept novateur serait à reprendre avec d’autres procès célèbres.

© denise-pelletier.qc.ca

LES CHÂTEAUX DU CIEL

De son côté, le théâtre Denise-Pelletier offrait une pièce d’époque, se déroulant à partir de 1864 où le jeune Louis II fut couronnée Roi de Bavière, à l’âge de 19 ans.

Des personnages importants tournent autour du jeune roi, tantôt c’est le chancelier Bismarck, tantôt son jeune frère qui partira guerroyer et en reviendra psychologiquement très blessé.

Le roi est rêveur et souhaiterait la compagnie de sa cousine Sissi, déjà mariée, mais c’est sa sœur Hélène avec qui il est lié sans enthousiasme. On le voit aussi attiré par son fidèle aide de camp.

Passionné d’art et de musique, le jeune roi s’entretient avec le compositeur Wagner qui le sollicitera souvent afin d’obtenir les fonds nécessaires à la création et à l’installation de son orchestre. Malgré les remontrances du roi, il finira par obtenir aussi une aide substantielle à la construction de l’Opéra de Bayreuth, toujours en activité.

La mise en scène était efficace, entre autres, par le changement très sobre de décor qui permettait de demeurer concentrée sur le déroulement de l’action, sans décrocher.

Certains passages étaient soulignés à travers le lyrisme de la musique de Richard Wagner, magnifiquement interprétée au piano. La douceur de la musique évitait de sombrer dans la lourdeur des déchirures dramatiques.

L’ensemble mettait en valeur le talent des comédiens.nes qui, chacun.e avec leurs nuances, nous entraînaient dans ces pans d’histoire revisités.

© rideauvert.qc.ca

PIF  LUISANT

Sobriquet attribué à Edmond Rostand qui se percevait comme laid et qui a cherché la beauté à travers les mots de ses pièces.

Auteur de pièces «démodées», selon son père,  et éreinté par la critique, à maintes reprises, Rostand s’est réfugié dans la maison de campagne familiale où il souhaite ardemment écrire, une pièce qui connaîtra enfin le succès auquel il aspire.

Cependant, Rostand devra convaincre son père de l’entretenir financièrement afin de parachever son chef-d’œuvre. Le père qui n’y croit plus, se fait tirer l’oreille mais accepte finalement de l’aider, pour une dernière fois.

Bien entouré d’un couple de domestiques dévoués et de leur fille que connaît Rostand depuis leur tendre enfance, celle-ci deviendra l’inspiration de Roxane dans le célèbre Cyrano de Bergerac. Rostand et la jeune femme «jouent» des extraits de Cyrano avec un jeune homme rêvant de devenir comédien, afin d’en vérifier l’efficacité.

Dans cette agréable maison, Rostand se sent libéré des soucis du quotidien et réussit à faire évoluer cette intrigue dense, écrite en alexandrins, émaillée d’humour et qui connaîtra le succès qui s’est prolongé jusqu’à présent, également au cinéma.

Les domestiques qui assurent la gestion de la maison, se querelleront gentiment, le mari se montrant subtilement jaloux du boulanger, du fromager et des autres commerçants que sa femme est amenée à côtoyer lorsqu’elle fait les courses pour la maisonnée, ce dont elle se défend avec aplomb.

La vivacité des réparties apportaient humour et fraîcheur à cette représentation dont la mise en scène dynamique, les costumes d’époque et le décor assuraient la véracité.

Bien servis par le texte de Gabriel Sabourin, tous les comédiens faisaient preuve d’un talent indéniable et ont réussi à nous faire vibrer tant par leur drôlerie que leur côté attachant.

Pas un seul moment d’ennui! Donc, un choix judicieux par l’équipe du Rideau-Vert.

toutatrac.com

LE RÊVEUR DANS SON BAIN

Il rêve tellement qu’il passe plus de 20 ans dans son bain, à écrire de la poésie, au grand dam de ses proches.

Dans cette création originale, est questionnée la relation de l’artiste vis-à-vis son œuvre et des répercussions de l’engagement artistique dans sa vie personnelle.

La conjointe du rêveur sera la première à sortir et de la baignoire et de la vie du rêveur et dira: «Comme toutes les Ondines des fonds de bain, je nage et viens à la rescousse des poète qui pataugent…»

Une allusion aux femmes artistes dans l’ombre de leur célèbre mari qui, à l’époque menait leur vie professionnelle tandis que leur épouse devait assumer les responsabilités des enfants et de la maison.

La mise en scène, outre les dialogues rebondissants, était ponctuée de projections visuelles présentant le magicien Houdini à travers l’œuvre du cinéaste Méliès, considéré comme un maître du merveilleux, dès la fin du 19e siècle.

Le fils tout de même aimant souhaite que la maison où vivait ce père absent ne soit pas démolie.  Il entreprend, avec succès, les démarches pour qu’elle soit conservée, une forme de démonstration de respect pour les lieux et d’affection pour son père et l’art.

Quant aux acteurs principaux, ils avaient ce genre de dialogue teinté des frustrations d’un couple qui n’a pas été capable de tenir la route longtemps.  À cet égard, les deux comédiens Normand d’Amour et Cynthia Wu-Maheux étaient formidables de justesse de ton.

Le Théâtre du Nouveau-Monde a réussi un pari audacieux avec cette pièce hors-normes.

Enfin, dès l’automne, les nombreux théâtres montréalais offriront, de nouveau, une grande variété de pièces susceptibles de plaire à un grand nombre de spectateurs.trices dont je suis. La culture me nourrit, me réjouit. Vraiment difficile de s’en passer!

– Collaboration spéciale, Francine Faucher –

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Échos Montréal

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