Visité par plus de 10 millions de personnes depuis sa fondation et reconnu pour sa capacité à faire vibrer le passé de Montréal, ainsi que le patrimoine mondial entre ses murs, Pointe-à-Callière (PÀC) marquera à son tour les pages d’histoire en célébrant son trentième anniversaire, le 17 mai prochain. 

© Tourisme Montréal – Marie Deschene

Inauguré le 17 mai 1992, alors que la métropole soulignait son 380e anniversaire, le Musée Pointe-à-Callière fut construit sur les lieux où a été célébrée, 350 ans plus tôt, la messe de fondation de Montréal devant Jeanne Mance, le sieur de Maisonneuve et leurs compagnons réunis sur une pointe de terre entre le fleuve Saint-Laurent et une petite rivière. Pendant longtemps, l’importance du lieu a été connue presque strictement par les géographes, jusqu’à ce que le musée soit érigé et nommé en l’honneur de Louis Hector de Callière, troisième gouverneur de Montréal, qui y avait fait construire sa résidence en 1695.

Pour mieux comprendre la naissance de Pointe-à-Callière, notre journaliste a discuté avec Anne Élisabeth Thibault, nommée Directrice générale de l’établissement à l’automne 2020, après le départ à la retraite de l’ancienne directrice et fondatrice du musée Francine Lelièvre, qui a occupé cette fonction depuis les tout-débuts du musée, soit presque trois décennies. «Au début des années 1980, plusieurs archéologues ont commencé à sensibiliser la Ville au sujet du Vieux-Montréal qui, sans être abandonné, n’était pas très actif avant l’arrivée du musée.» Ils ont informé les élus à propos du lieu de fondation de Ville-Marie, qui serait situé sur l’emplacement du premier phare aménagé en 1642. «La Ville a entrepris les premières fouilles archéologiques sur la Place Royale et découvert un enchevêtrement de vestiges datant de différentes époques, dont certains remontent à plus de 4500 ans. Par la suite, Montréal a accordé des permis pour ouvrir le site où se trouve le musée, qu’on croyait non loin du phare. On a finalement découvert le premier cimetière de 1642 et déterminé que le site était le lieu de fondation de Ville-Marie.»

Seul musée d’archéologie d’envergure au Canada, institution muséale historique la plus fréquentée à Montréal, site archéologique et historique national, Pointe-à-Callière a vu le jour en partie grâce au travail du maire Jean Doré. «Il a eu la vision de préserver ce site archéologique en y construisant un musée, comme une forme de legs à la population montréalaise en 1992. Sans cette volonté de protection et de mise en valeur, le site aurait été très fragile et soumis aux pics éventuels des démolisseurs. Avec l’aide d’une équipe, il a convaincu les gouvernements fédéral et provincial de donner un coup de pouce à la Ville pour construire nos trois pavillons.»

À l’origine, les dirigeants du musée se trouvaient audacieux d’espérer un achalandage annuel de 125 000 visiteurs. Pourtant, dès sa première année, Pointe-à-Callière a accueilli 135 000 personnes. Profitant d’une progression constante, l’institution a franchi le demi-million de visiteurs annuels avant la pandémie. «Entre 2015 et 2019, nous avons connu une augmentation de fréquentation de 32%, alors que les attractions payantes ailleurs à Montréal et au Québec ont augmenté respectivement de 7% et de 2%. Plus les années passent, plus l’intérêt des gens pour l’histoire et l’archéologie grandit.»

La popularité n’est pas le seul gage du succès du musée, alors que les partenariats avec les institutions étrangères ont explosé au fil du temps. Si PÀC a présenté des expositions locales entre 1992 et 1998, il s’est ensuite tourné vers l’international pour accueillir de nombreuses expositions. Comment expliquer une collaboration si rapide avec les organisations basées à l’étranger? «Pointe-à-Callière est un musée de site authentique qui préserve sept sites historiques importants et qui évolue dans la grande métropole francophone en Amérique du Nord. Petit à petit, le musée a fait son chemin, développé sa crédibilité et les prêteurs internationaux lui ont fait confiance. Aujourd’hui, plus de 250 institutions internationales ont prêté au musée des morceaux du patrimoine de l’humanité pour les présenter aux Montréalais.»

Ayant depuis ses débuts pour mission de faire aimer et connaître l’histoire de Montréal à la population, Pointe-à-Callière a également frappé de grands coups avec ses expositions d’envergure mondiale. Quand on questionne la Directrice générale, qui a succédé à la fondatrice et ex-Directrice générale, Francine Lelièvre, de cibler certains jalons de l’histoire de l’institution, elle évoque tout de suite l’exposition sur les manuscrits de la Mer morte en 2003. «Ce sont des manuscrits très anciens qui sont gardés précieusement en Israël. C’est d’ailleurs la seule fois qu’ils sont sortis du pays. Non seulement l’exposition a fait un tabac au Québec, mais elle a aussi attiré des visiteurs de partout dans le monde et permis au musée d’asseoir sa notoriété internationale auprès des visiteurs, de prêteurs et de la presse étrangère.»

Un peu plus d’une décennie plus tard, l’exposition Les Grecs – D’Agamemnon à Alexandre Le Grand a également marqué l’histoire du musée. «C’était la plus grande exposition sur la Grèce antique jamais réalisée en Amérique: elle racontait 5000 ans d’histoire et de culture grecques. Ce fut une porte d’entrée pour aller chercher de prêts importants par la suite, en plus de faire courir des gens de partout. L’exposition a ensuite été présentée à Washington, Chicago et au Musée canadien de l’histoire à Gatineau, ce qui a fait entrer Pointe-à-Callière dans une ère de tournées.» Évidemment, l’exposition de 2018 sur les Reines d’Égypte a été un véritable coup de circuit. D’une part, pour son record de fréquentation, avec 300 000 visiteurs en seulement six mois. D’autre part, parce que Pointe-à-Callière était l’instigateur de l’exposition auprès de plusieurs institutions américaines.

Quand vient le temps de réfléchir au futur du musée, Anne Elisabeth Thibault parle avec enthousiasme de la mise en valeur du premier marché couvert de Montréal (le marché Sainte-Anne) et du parlement de la «province du Canada» sur la Place Youville Ouest. «C’est le plus grand site archéologique au Canada, avec des vestiges d’environ cinq mètres de haut en bon état. Néanmoins, le site est très fragile en ce moment. Le musée souhaite le préserver pour redonner ce joyau aux Montréalais et aux Montréalaises.»

D’ici là, les amoureux de Pointe-à-Callière auront de quoi festoyer avec une cinquantaine d’activités prévues pour le trentième anniversaire. L’institution a lancé le bal en février dernier avec Coup de cœur! Nos collections s’exposent, une exposition composée de 400 artefacts issus des collections ethnographiques du musée. «En regardant dans nos collections, on a voulu représenter Montréal selon différentes thématiques: les transports, le port qui a été une clé pour l’ouverture vers l’Ouest, les grands magasins, le Montréal sportif et les beaux objets nous rappelant les anciens intérieurs» Une application permettra également aux visiteurs de découvrir 30 artefacts coups de cœur entre les murs du musée.

À l’extérieur, au cours de l’été à venir, un arbre à souhaits sera aménagé afin que les visiteurs puissent exprimer leurs souhaits pour Montréal dans l’avenir. Une murale sera également peinte au sol. Sans oublier le grand quiz du 17 mai sur les connaissances à propos de la métropole et une série de cinq baladodiffusions dans lesquelles des duos de personnalités échangeront sur des sujets reliés à l’histoire de Montréal. Par ailleurs, le public aura accès gratuitement au musée le jour de son anniversaire et pourra se procurer des abonnements individuels au prix de 30$. 

Bannière principale © Pointe-à-Callière, Caroline Bergeron

À propos de l'auteur

Samuel Larochelle

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