Les teintes orangées prennent sans demander tous les reflets. Plus jalouse de son temps, la lumière s’éclipse au profit d’une noirceur de plus en plus insistante. À l’orée des mois difficiles, de la froideur, des nuits sans fin, Halloween, et sa mythologie terrifiante, pointe le bout de son nez. Mais le maléfique n’est pas l’affaire d’une journée, oh que non, et Montréal n’a pas son pareil en matière de hantises… À l’aube du mois des morts, Échos vous transporte à la frontière entre le réel et l’imaginaire, ruelle où logent les fantômes et prennent vie les histoires sinistres. Tour éclair des visites guidées montréalaises qui donnent la chair de poule. 

Montréal hanté

Parcours au périmètre le plus étendu des organismes consacrés à l’exploration macabre, les circuits de Montréal hanté font du Mont-Royal, de Griffintown et du Centre-Ville les lieux de toutes les subversions. Au cours de visites s’étirant sur 90 minutes, les plus courageux font «l’agréable» connaissance de personnages ayant réellement existé, et dont la fin immanquablement mystérieuse alimente les histoires les plus sordides. 

Demeure de Simon McTavish © Belairdirect.com

Prenons le cas de Simon McTavish, richissime homme d’affaires ayant fait fortune dans le commerce des fourrures. Mort subitement et dans des circonstances nébuleuses alors qu’il supervise les travaux de construction de sa propre demeure, l’Écossais d’origine – ou plutôt, son fantôme – fit des apparitions spontanées, souvent à cheval sur son cercueil, dévalant les pentes du Mont-Royal. Dans une tentative de conjurer le sort de McTavish, la Ville de Montréal, en 1861, fit raser la maison alors abandonnée avant d’ensevelir son mausolée, sise tout près de la rue Peel et du Chemin Olmsted. Une manœuvre efficace, puisque les manifestations du fantôme cessèrent. Mais comme toute bonne histoire d’horreur, les fins heureuses ne sont qu’illusoires. (D’un point de vue conceptuel, les récits s’alimentant du présent et se réactivant au rythme de l’actualité, il est possible de repousser constamment tout dénouement!). Donc, disions-nous, c’est ainsi que le spectre de McTavish serait de retour, contrarié par les fouilles archéologiques effectuées en 2010 à proximité de son tombeau…

Brillamment animés par des conteurs et acteurs professionnels, les trajets de Montréal hanté font entre 1,5 et 2 kilomètres et, même si les guides transportent chacun une lanterne, il est conseillé d’apporter sa propre lampe de poche, notamment si on fait le choix du parcours sur le Mont-Royal. Enfin, l’entreprise offre une pub crawl hors de l’ordinaire: on fait la visite de trois établissements dits hantés, soit le McKibbin’s et le Hurley’s, élusifs pubs d’inspiration irlandaise, le Sir Winston Churchill Pub et Le Cinq. Les histoires horrifiantes s’y écoulent à la cadence des bières.

Fantômes Montréal

Marie-Joseph Angélique © Bibliothèque et Archives Canada

Depuis 1999, les guides de Fantômes Montréal assombrissent les rues pavées du Vieux-Montréal de récits remontant jusqu’à la Nouvelle-France. L’emblématique rue Saint-Paul serait notamment le siège de nombreux épisodes particulièrement funèbres. Vous connaissez Marie-Joseph Angélique ? C’est cette esclave noire qui a été accusée de l’incendie ayant rasé le quartier marchand de Montréal en 1734, acte qui aurait été commis alors qu’elle prenait la fuite vers le Portugal, son pays d’origine. Torturée puis pendue, Marie-Joseph Angélique, portant au cou un écriteau affichant l’épithète «incendiaire», reviendrait hanter la célèbre rue, protestant de cette façon contre une exécution dont la légitimité a toujours été remise en doute. 

À 20h30 tapant, les amateurs d’horreur et d’histoire, emboitent le pas de l’un des 25 guides, tous acteurs professionnels méticuleusement accoutrés pour l’occasion. Le jeu des comédiens ajoute une touche de glauque à une ambiance déjà fantomatique. C’est que le Vieux-Montréal, avec ses murs de pierre, ses ruelles pittoresques et ses places historiques constitue à lui seul un retour en arrière, un plongeon dans cette époque où le folklore québécois prend racine. Le jeu du temps, en effritant la véracité des événements, vient brouiller la frontière entre faits et légendes, un ferment essentiel dans la construction d’une histoire d’horreur efficace. 

N.B. Étant donné les circonstances entourant la seconde vague de covid-19 au Québec, les activités de Montréal hanté et de Fantômes Montréal sont suspendues jusqu’au 29 octobre. Elles devraient reprendre sous certaines conditions à partir de cette date. Consultez les sites internet de ces organismes au préalable pour plus d’informations à ce sujet.

Bannière principale: © Bibliothèque et Archives Canada

À propos de l'auteur

Échos Montréal

Laissez un commentaire